Je voulais juste vivre est une histoire que vous ne serez pas prêt d’oublier. Mais avant d’en parler, voici quelques mots sur l’auteure.
Qui est Yeonmi Park ?
Yeonmi Park est née dans une famille de fonctionnaires en Corée du Nord. Elle a grandi dans un pays où le régime contrôle tout ce que l’on apprend, où l’on va, ce que l’on dit, et même ce que l’on pense. Alors que le pays est victime de la famine, elle s’enfuie avec sa mère et entame un long et périlleux voyage qui les emmène en Chine, en Mongolie, puis en Corée du Sud où elle s’est installée. Aujourd’hui, à 22 ans, elle est une fervente militante des droits de l’homme très en vue dans le monde entier luttant pour la cause de la population nord-coréenne.
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Je voulais juste vivre, le résumé :
Yeonmi a 13 ans, sa courte vie est déjà marquée par le désespoir. Elle n’a qu’une solution : fuir son pays, la Corée du Nord. Elle ne se doute pas que le chemin vers la liberté va l’entraîner en enfer…
Après des années de privations et de harcèlement, par une nuit glaciale, Yeonmi, 13 ans, et sa mère, réussissent à traverser le fleuve Yalu qui marque la frontière entre la Corée du Nord et la Chine. Elles laissent derrière elles leur pays natal et ses horreurs : la faim, la délation constante et surtout une répression impitoyable et le risque permanent d’être exécutées pour la moindre infraction. Mais leur joie n’est que de courte durée. Rien ne les a préparées à ce qui les attend entre les mains des passeurs. Après plusieurs années d’épreuves inhumaines et un périple à travers la Chine et la Mongolie, Yeonmi atteint finalement la Corée du Sud.
À 22 ans, Yeonmi est désormais une combattante : c’est l’une des plus influentes dissidentes nord-coréennes et une activiste reconnue des droits de l’homme.
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Je voulais juste vivre, le prologue :
Le 31 mars 2007, par une nuit froide et obscure, ma mère et moi avons descendu la berge abrupte et rocailleuse du fleuve Yalu, alors gelé, qui sépare la Corée du Nord de la Chine. Des hommes patrouillaient au-dessus de nos têtes et à nos pieds, et à une centaine de mètres de chaque côté se trouvaient des postes de guet avec des soldats armés et prêts à tirer sur quiconque tenterait de franchir la frontière. Nous n’avions aucune idée de ce qui nous attendait, mais nous étions prêtes à tout pour entrer en Chine, où nous aurions peut-être une chance de survivre. J’avais treize ans et je pesais tout juste vingt-sept kilos.
Moins d’une semaine plus tôt, j’avais été hospitalisée à Hyesan, ma ville natale, située à la frontière chinoise, à cause d’une infection intestinale grave diagnostiquée à tort comme appendicite par les médecins. L’incision me faisait encore affreusement souffrir et j’étais si faible que je parvenais à peine à marcher. Le jeune passeur nord-coréen qui nous faisait traverser insistait pour agir cette nuit. Il avait payé des gardes pour qu’ils ferment les yeux mais impossible de soudoyer tous les soldats alentour ; nous devions donc faire preuve d’une extrême prudence. Je l’ai suivi dans le noir, mais j’étais si instable sur mes jambes que j’ai dévalé la berge sur les fesses, provoquant des avalanches de cailloux devant moi. Il s’est retourné pour me murmurer avec colère de faire moins de bruit. Trop tard. Nous distinguions déjà la silhouette d’un soldat nord-coréen qui remontait depuis le lit du fleuve. Si l’homme faisait partie des soldats soudoyés, il ne semblait pas nous reconnaître.
Partez ! a-t-il hurlé. Rentrez chez vous ! » Notre guide est allé à sa rencontre et nous les avons entendus discuter à voix basse. Le guide est revenu seul. « Allons-y, a-t-il dit. Dépêchez-vous ! » Le printemps venait de s’installer et le temps se radoucissait, faisant fondre des plaques à la surface du fleuve gelé. L’endroit où nous traversions était étroit et profond, protégé du soleil en journée si bien que la glace y était suffisamment solide pour supporter notre poids nous l’espérions en tout cas. Le passeur s’est servi d’un téléphone portable pour contacter quelqu’un sur l’autre rive, côté chinois, puis il a murmuré : « Courez ! » Il s’est élancé mais mes pieds refusaient de bouger et je me suis accrochée à ma mère. La peur me paralysait. Le guide est revenu vers nous en courant, il m’a saisie par les mains et m’a tirée sur la glace. Une fois la terre ferme retrouvée, nous nous sommes mis à courir sans nous arrêter jusqu’à nous retrouver hors de vue des gardes-frontières. La berge était sombre mais les lumières de Changbai, en Chine, brillaient juste au-dessus de nous. Je me suis retournée pour jeter un rapide coup d’ceil à l’endroit qui m’avait vue naitre. Le réseau électrique était coupé, comme d’habitude, et je ne voyais que l’horizon noir et inerte. Mon cœur a bondi dans ma poitrine lorsque nous sommes arrivés à une petite cabane en bordure de champs plats et désolés. Je ne rêvais pas de liberté en quittant la Corée du Nord. Je ne savais même pas ce qu’être libre signifiait. Ma seule certitude, c’était que si ma famille ne partait pas, nous allions mourir de faim, de maladie, emprisonnés dans des conditions inhumaines dans un camp de travail. La faim était devenue insoutenable ; j’étais prête à risquer ma vie contre la promesse d’un bol de riz.
Toutefois notre voyage n’avait pas pour seul objectif notre survie. Ma mère et moi étions à la recherche de ma sœur ainée, Eunmi, partie pour la Chine quelques jours plus tôt et dont nous étions sans nouvelles depuis. Nous espérions qu’elle nous attendrait de l’autre côté du fleuve. Malheureusement, la seule personne qui nous a accueillies était un Chinois chauve d’une cinquantaine d’années, d’origine nord-coréenne comme bon nombre d’habitants le long de cette frontière.
L’homme a dit quelque chose à ma mère puis l’a conduite derrière le bâtiment. Je suis restée sans bouger mais j’ai pu l’entendre supplier : « Aniyo ! Aniyo ! » Non ! Non ! J’ai compris qu’il se passait quelque chose de grave. Nous étions arrivées dans un endroit dangereux, peut-être pire encore que celui que nous venions de quitter. Je suis reconnaissante de deux choses : être née en Corée du Nord, et avoir fui la Corée du Nord. Ces deux événements ont modelé ma vie et je ne voudrais pas les échanger contre une e:dstence ordinaire et paisible. Toutefois, mon histoire, comment je suis devenue celle que je suis aujourd’hui, ne se résume pas à ça.
Tout comme des dizaines de milliers de Nord-Coréens, j’ai fui mon pays et je me suis installée en Corée du Sud, nation qui voit encore en nous des concitoyens, comme si une frontière fermée et près de soixante-dix ans de conflits et de tensions ne nous avaient jamais séparés. Nord-Coréens et Sud-Coréens partagent le même héritage ethnique, et parlent la même langue — si ce n’est qu’au Nord, il n’existe pas de mots pour des concepts comme les « centres commerciaux », la « liberté », ou même 1’« amour », en tout cas pas tels que le reste du monde les conçoit. Le seul véritable « amour » que nous pouvons exprimer est celui pour les Kim, dynastie de dictateurs à la tête de la Corée du Nord depuis trois générations. Le régime bloque toute information extérieure, les vidéos et les films, et brouille les fréquences radio. Il n’y a pas d’Internet ni de Wikipédia. Les seuls livres disponibles sont remplis de propagande nous assenant que nous habitons le meilleur pays du monde, même si au moins la moitié des Nord-Coréens vit dans une pauvreté extrême et que beaucoup souffrent de malnutrition chronique. Mon ancien pays ne se nomme même pas Corée du Nord, il se proclame Chosun la vraie Corée , paradis socialiste parfait où vingt-cinq millions de gens ne vivent que pour servir le Chef Suprême, Kim Jong-un. Beaucoup d’entre nous qui avons fui sont appelés des transfuges » car en refusant notre destin, en refusant de mourir pour le Dirigeant, nous avons déserté et failli à notre devoir.
Le régime nous considère comme des traîtres. Si j’essayais de revenir, je serais exécutée. Le blocus de l’information fonctionne dans les deux sens : non seulement le gouvernement bannit la presse étrangère, mais il empêche également le reste du monde d’apprendre la vérité sur la Corée du Nord. Le régime est considéré comme un royaume ermite car il fait tout pour rester secret. Seuls ceux d’entre nous qui en ont réchappé peuvent témoigner de ce qu’il se passe vraiment derrière ces frontières cadenassées. Mais jusqu’à récemment, nos récits n’étaient guère entendus.
Je suis arrivée en Corée du Sud au printemps 2009 ; une enfant de quinze ans sans un sou en poche, dotée d’un bagage scolaire équivalent à deux années d’école primaire. Cinq ans plus tard, j’entamais ma deuxième année dans une grande université de Séoul pour devenir fonctionnaire de police, j’étais animée d’une conscience grandissante concernant le besoin urgent de justice dans le pays où je suis née. J’ai raconté mon évasion de Corée du Nord à de nombreuses reprises, dans de multiples conférences.
J’ai décrit comment les trafiquants d’êtres humains nous ont piégées, ma mère et moi, lors de notre passage en Chine, et comment ma mère m’a protégée en se sacrifiant, violée par le passeur chinois qui voulait s’en prendre à moi. Une fois en Chine, nous avons continué à rechercher ma sœur, sans succès. Mon père a franchi la frontière pour nous rejoindre dans nos investigations mais il est mort d’un cancer non soigné quelques mois plus tard. En 2009, ma mère et moi avons été secourues par des missionnaires chrétiens qui nous ont conduites à la frontière mongole. De là, nous avons traversé à pied le désert de Gobi, glacial, au cours d’une interminable nuit d’hiver, suivant les étoiles vers la liberté. Tout cela est vrai, mais ce n’est pas toute l’histoire.
Avant aujourd’hui, seule ma mère connaissait la vérité sur les événements survenus au cours des deux années qui se sont écoulées entre la nuit où nous avons traversé le Yalu pour entrer en Chine et le jour où nous sommes arrivées en Corée du Sud pour démarrer une nouvelle vie. Je n’ai presque rien confié de mon histoire au.x autres transfuges et aux défenseurs des droits de l’homme rencontrés en Corée du Sud. Je croyais que, d’une certaine manière, en reniant l’indicible passé, il disparaîtrait. Je me suis convaincue qu’une grande partie des faits n’avait jamais eu lieu ; je me suis forcée à oublier le reste. Cependant, en entamant l’écriture de ce livre, je me suis rendu compte que sans la vérité tout entière, ma vie n’aurait aucune valeur, aucun sens véritable.
Avec l’aide de ma mère, les souvenirs de nos années en Corée du Nord et en Chine me sont revenus telles les scènes d’un cauchemar oublié. Certaines images apparaissaient avec une clarté terrifiante, d’autres restaient plus brumeuses, mélangées comme les cartes éparpillées au sol. Le travail de narration a été un travail de mémoire, et une tentative de donner sens à ces souvenirs. De même que l’écriture, la lecture m’a aidée à organiser mon monde.
À mon arrivée en Corée du Sud, j’ai dévoré toutes les traductions des plus grandes œuvres que je pouvais me procurer. Plus tard, j’ai été en mesure de les lire en anglais. Puis en commençant la rédaction de mon propre livre, je suis tombée sur une citation de Joan Didion : « Nous nous racontons des histoires afin de vivre. » Même si l’auteur et moi venions de cultures très différentes, je sentais la vérité de ses mots faire écho en moi. Je comprends que, parfois, le seul moyen de survivre à nos propres souvenirs c’est d’en façonner des histoires afin de donner un sens à des événements autrement inexplicables.
Au cours de mon périple, j’ai les horreurs que les humains peuvent s’infliger les uns aux autres mais j’ai également été témoin d’actes de tendresse et de gentillesse, de sacrifices dans les pires circonstances imaginables. Je sais qu’on peut perdre une part de son humanité à tenter de survivre. Mais je sais aussi que l’étincelle de dignité humaine ne s’éteint jamais totalement, et qu’avec une bouffée de liberté et le pouvoir de l’amour, elle peut à nouveau s’embraser. Voici mon histoire, celle des choix que j’ai faits afin de vivre.
Je voulais juste vivre :
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